Montée sur la Puna
Publié le 6 Mars 2012
Apres avoir quitté Tilcara, nous passons à Huacalera , ou se trouve le consul de France de la Province pour faire faire nos procurations pour les élections présidentielles. Pour y arriver nous passons le Tropique du Capricorne, ou une stèle montre que le soleil du solstice d’été est strictement perpendiculaire à cet endroit.
Le consul et sa femme argentine ont beaucoup voyagé en Amérique du Sud avant de s’installer dans ce petit village au pied de roches polychromiques.
Ils tiennent un hôtel bien sympathique. Nous n’avons pas beaucoup pédalé ce jour-là mais l’endroit est bien accueillant et nous y restons une journée. Nous irons quand même marcher un peu l’après-midi histoire de ne pas perdre la forme ! Une petite colline avoisinante offre une vue splendide sur la vallée, une « apacheta » y trône, rendant grâce à la Pachamama, Mère de la Terre. Ici la Madre Tierra donne tout aux villageois, la terre, sert à faire les maisons, les poteries, le four est lui aussi en terre, et tout le monde lui rend hommage. Les croyances mêlent intimement Dieu et rites ancestraux.
Nous continuons notre montée vers la Puna au rythme des petits villages, Uquia, et sa petite église célèbre pour ses peintures d’archanges arquebusiers. Humahuaca est le bourg le plus important de la Quebrada et lui a donné son nom. De jolies rues pavées, des maisons en adobe peintes en blanches.
Depuis 2 jours, le temps a changé, un ciel bleu et pur nous accompagne. Les gens d’ici nous ont dit que la saison des pluies était finie. L’automne arrive et la pluie ne reviendra qu’en novembre prochain. Mais là où nous allons, vers le Nord et les montagnes, la pluie peut durer encore un peu comme nous aurons l’occasion de le vérifier les jours suivants. La montée est facile car la pente est très douce. Nous avançons donc régulièrement sans trop forcer. La végétation s’amenuise peu à peu mais reste étonnamment verte pour l’altitude. Le vent souffle doucement et nous pousse. Passé Hornaditas, communauté aborigène de quelques maisons, ou nous déjeunons, nous espérons trouver un lieu pour camper. Mais le mauvais temps nous attrape, l’orage gronde de part et d’autres et au milieu des gouttes de pluie nous recevons quelques flocons !
Nous poussons donc jusqu’à Azul Pampa, minuscule village de 20 habitants. Faustino qui tient un petit kiosque nous ouvrira les portes de l’’école pour que nous dormions à l’abri. Nous nous installons dans cette petite classe unique, où habituellement 8 enfants prennent place. Nous y dormirons merveilleusement bien, sous le tableau noir. C’est encore les vacances et la classe ne reprendra que dans quelques jours. Nous sommes maintenant au-delà de 3000m et les petits matins sont bien frais, nous avons ressorti tous nos vêtements chauds qui n’avaient plus servi depuis longtemps. 6 degrés pour le petit déjeuner c’est frisquet mais la vue est splendide.
Ce jour-là, nous quitterons la Quebrada de Humahuaca après avoir admiré d’autres paysages magnifiques, roches rouges ou vertes, vallée profonde du Rio Grande, épines du diable…
Tres Cruces, village improbable, perdu à la fin de la Quebrada, balayé par les vents et le sable est sillonné par les multiples camions qui font le trajet entre l’Argentine et la Bolivie. Nous nous y arrêtons juste le temps de quelques courses. Quelques kilomètres plus loin, nous passons fièrement le col à 3780 mètres. A nous la descente, nous voilà maintenant sur la Puna, les hauts plateaux argentins, et comme par enchantement, nous croisons pleins de troupeaux de lamas, ainsi que quelques vigognes, cousine sauvage du lama, maintenant espèce protégée. Des petits pompons de couleurs aux oreilles et des fils accrochés à leurs poils indiquent la famille qui les détient.
La pause déjeuner devant quelques lamas nous réservera une bonne surprise. Nous voyons arriver un camion de voyageurs, devant nos signes ils s’arrêtent, et en descendent 4 adultes et 5 enfants, tous français ! Les chamacos voyagent depuis un an et demi, partis de France, ils ont traversé toute l’Afrique du Nord au Sud en camion et découvrent maintenant l’Amérique du Sud. Les « mochilas » eux, commencent leur découverte du continent en sac à dos et partagent le camion pour quelques jours. Nous discuterons un bon moment, espérant nous retrouver plus tard en Bolivie.
Et puis autre moment attendu des enfants, nous arrivons aux dunes de sable juste avant Abra Pampa. Une immense dune bordée d’une petite lagune, où un flamant rose s’envolera à notre approche.
Après avoir pédalé plusieurs heures, passé un col, ils trouveront tous la force de grimper et dévaler la dune à plusieurs reprises, s’amusant sans fin. Pendant ce temps nous nous reposons et apprécions la vue du petit sommet d’en face.
Tout le monde supporte bien l’altitude, nous sommes montés très progressivement. Nous avions prévu de bivouaquer au pied de la dune, mais là encore le temps viendra contrecarrer nos plans, des deux côtés l’orage arrive, le vent se lève et les éclairs zèbrent le ciel. Nous filons donc vers Abra Pampa, heureusement poussés à une vitesse incroyable par le vent. Nous nous posons au sec au moment où la pluie se met à tomber. Nous voilà maintenant sur le plateau andin, et resterons à la même altitude pendant plusieurs jours. Nous croisosn sans cesse des troupèaux de lamas, parfois de moutons et quelques vaches. Les rigueurs du climat ici rendent l'agriculture difficile car les gelées sont fréquentes. la majeure partie de la population vit donc de l'élevage.
La route pour La Quiaca est rectiligne, d’immenses lignes droites. Nous la parcourrons finalement en une journée, facilement le matin, où le vent nous pousse, et finirons épuisés les 30 derniers kilomètres luttant contre le vent de plus en plus fort. Nous y trouvons heureusement un lieu accueillant dans une petite hospedaje familiale, où nous restons deux nuits. Un jeune couple de Buenos Aires s'est installe dans la maison de leurs grand parents d'origine syrienne et y ont amene un peu de la Bocca, célèbre quartier de la capitale pour ses maisons colorées. L'endroit est vraiment très accueillant et cette famille adorable.La Quiaca est loin de l’image que nous nous en faisions : ville frontière, balayée par le vent et sans intérêt. Ici, nous sommes déjà presque en Bolivie, les femmes portent des jupes colorées, et s’abritent sous un chapeau melon, un grand tissu bariolé sur le dos pour porter leurs enfants. Le marché local est bien agréable et la température en cette fin d’été aussi même si elle chute dès que le soleil disparaît.
La Bolivie n’est plus qu’à quelques mètres mais nous prolongeons notre séjour en Argentine en allant à Yavi, petit village andin, qui semble figé dans le temps.
Il n’est qu’à 16 kilomètres de La Quiaca. Nous y allons donc tranquillement prenant le temps d’approcher les vigognes qui sont peu farouches. Maisons en adobe, rues tranquilles, les 200 âmes qui peuplent ce village vivent au calme. Une belle église avec son autel recouvert de feuilles d’or et des vitres translucides en onyx, attire quelques visiteurs, ainsi qu’une vieille demeure du XVIII ème devenue musée. On y découvre la vie sur la Puna, et de beaux meubles de l’époque. Nous irons nous promener dans le canyon qui entoure le village, et abrite des peintures rupestres et quelques grottes. Il est étonnamment vert avec d’immenses saules pleureurs et de nombreuses fleurs, toujours surprenantes à cette altitude. Nous poussons aussi jusqu’à Yavi Chico, autre petit village, situé 4 kilomètres plus loin par une piste en montagnes russes.
Nous retournons maintenant sur La Quiaca et quitterons l’Argentine après deux mois et demi et des paysages fascinants.